• Valérie Besson, Associée |
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Le rôle des villes, des acteurs de l'énergie et des services publics pour atteindre la neutralité carbone

Piloter les nouvelles technologies dans les zones urbaines

Les villes sont au cœur de la transition mondiale vers la neutralité carbone. Plus de la moitié d'entre nous vivons dans des zones urbaines, et probablement les deux tiers d'ici 2050. Alors que les villes n'occupent que 3 % de la superficie terrestre, elles produisent plus des trois quarts des émissions de gaz à effet de serre et utilisent plus des trois quarts des ressources naturelles.

En novembre 2022, KPMG a lancé le Net Zero Urban Program (NZUP) lors de la COP27 sur le changement climatique, qui s’est tenue en Égypte. "Nous pensons que nous avons un rôle sociétal en aidant nos réseaux à s'associer avec ceux qui sont tout aussi passionnés que nous par l'accélération de la lutte contre le réchauffement climatique", a déclaré John McCalla-Leacy, responsable mondial ESG, KPMG International. Le NZUP est un programme ambitieux qui vise à mettre en relation les créateurs de technologies numériques avec les investisseurs ; l’objectif : convertir 10 000 villes, développer 100 prototypes numériques et lever 25 milliards de dollars de capital d'ici 2030. Un modèle réplicable d’une ville à l’autre et aux résultats mesurables.

Des opportunités pour les énergéticiens et les entreprises du service public

Les villes, densément peuplées, sont idéales pour l'expérimentation et la démonstration de projets de décarbonation reposant sur des réseaux de services publics efficaces et flexibles. L'énergie et les services publics jouent un rôle essentiel pour aider les villes à atteindre la neutralité carbone. Ils savent développer des produits et des services qui façonneront les futurs marchés en tirant parti des écosystèmes urbains.

Les industries des services publics devraient envisager des investissements sur un horizon de plusieurs décennies, puisque les projets d'aujourd'hui dureront probablement jusqu'en 2050 et au-delà. En adoptant des mesures plus vertes, en investissant dans l'innovation et en établissant des partenariats avec les collectivités, les entreprises peuvent aider les villes à créer un avenir durable et à atteindre leurs objectifs en matière de neutralité carbone.

Énergie

Alors que les villes s'orientent vers la neutralité carbone, les entreprises du secteur des énergies ont l’opportunité de contribuer à cet objectif en leur fournissant de l'énergie décarbonée. Plusieurs sources d'énergie alternatives sont disponibles pour remplacer les combustibles fossiles, notamment les énergies renouvelables, les réseaux de chaleur, l'hydrogène et l'énergie nucléaire. Autre exemple : les petits réacteurs nucléaires modulaires, rentables et de construction rapide, peuvent remplacer les centrales électriques (au charbon, au fioul). En modernisant leur infrastructure, les entreprises d'énergie peuvent aider leurs clients à devenir plus économes en énergie et à moins gaspiller.

Certains énergéticiens se sont déjà engagés vers d’importants changements. Ainsi, l’entreprise américaine Xcel Energy a annoncé une série d'objectifs de décarbonation couvrant l'électricité, les transports et le gaz naturel, qu’elle atteindra notamment au moyen de l'hydrogène et du gaz naturel renouvelable. En novembre 2021, elle s'est fixée l’objectif d'un bilan carbone neutre d'ici 2050, avec des objectifs intermédiaires, notamment une réduction de 80 % de ses émissions de gaz naturel d'ici 2030. Los Angeles vise à n'utiliser que des énergies renouvelables d'ici 2045 tout en électrifiant ivses bâtiments et transports. Los Angeles Water and Power collabore avec le National Renewable Energy Laboratory sur un projet scientifique qui permettrait d'atteindre cet objectif tout en améliorant l'environnement, la santé et les conditions socio-économiques. 

Dans le cadre de son plan de développement durable, CPFL Energia au Brésil a investi dans des hôpitaux économes en énergie et a rendu ses opérations numériques et durables. Environ 200 hôpitaux sont équipés de panneaux solaires et d'un éclairage LED à faible consommation d'énergie. 

La transition vers l'hydrogène est aussi un sujet majeur, qui amène les entreprises du monde entier à repenser la manière dont elles transportent, distribuent et stockent l'hydrogène. En outre, elles cherchent à rendre la production d'énergie plus durable, notamment en ce qui concerne les sources de carburants utilisées pour l'électrolyse et le mélange de carburants. Aujourd'hui, les investissements dans l'hydrogène se concentrent principalement sur les secteurs portuaires et industriels, bien que des véhicules à hydrogène soient également testés en milieu urbain.

Ainsi, la National Hydroelectric Power Corporation en Inde a signé deux accords pour piloter les technologies d'hydrogène vert au Ladakh ; une feuille de route organise le développement futur de l'hydrogène vert et la réduction des émissions de carbone ; avec à la clé des opportunités d'emplois à long terme dans l'économie de l'hydrogènevii offerts aux jeunes locaux grâce à ces deux projets pilotes.

Autre initiative cruciale : le programme Important Projects of Common European Interest (IPCEI), crée par l'Union européenne, pour soutenir des technologies et des projets stratégiques clés, tels que la production d'hydrogène et de batteries. 

 Par exemple, un programme de Mission Innovation sur l'hydrogène vert ambitionne de ramener les coûts totaux de la production d'hydrogène propre à un seuil de deux dollars par kilogramme d'ici à 2030. Grâce à ces programmes, des fonds et des ressources sont mis à disposition pour promouvoir le développement et le déploiement de technologies visant à accélérer la transition de l'UE vers une économie à faibles émissions de carbone. 

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Eau

Les entreprises spécialisées dans la distribution d’eau et les services d’assainissement peuvent améliorer l'efficacité énergétique de leurs équipements et promouvoir la conservation de l'eau par l'éducation et des incitations pour une meilleure utilisation. Cellesci peuvent également générer leur propre énergie. En janvier 2023, l’entreprise britannique Thames Water et KPMG au Royaume-Uni ont publié des études sur la manière dont la chaleur des eaux usées, comme celle des douches et des machines à laver, pourrait être récupérée et utilisée dans les réseaux de chauffage urbains, une technique déjà utilisée dans plus de 500 sites dans le monde. xPar exemple, 95 % de toutes les propriétés de la ville d'Uppsala sont alimentées par le chauffage urbain, grâce notamment à la chaleur récupérée des eaux usées traitées depuis 1981. xiLes études ont révélé que Thames Water, qui fournit de l'eau et évacue les eaux usées de 15 millions de clients à Londres et dans le sud-est Angleterre, pourrait alimenter environ un million de foyers en chauffage et en eau chaude grâce à ce système de récupération de la chaleur.

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Déchets

Des innovations peuvent permettre aux services publics de gestion des déchets de mettre à niveau ou moderniser leurs flottes de véhicules pour réduire les émissions, diminuer les déchets et augmenter le recyclage grâce à l'éducation des clients. Ainsi, il est possible de récupérer l'énergie des déchets grâce à la digestion anaérobique, par laquelle la matière organique se décompose dans un récipient scellé sans oxygène pour produire du biogaz et des engrais. Suez, société française de distribution d'eau et de traitement des déchets, a calculé qu'elle avait ainsi évité des émissions de gaz à effet de serre équivalentes à 3,8 millions de tonnes de dioxyde de carbone en 2021 ; ceci, grâce à la valorisation énergétique des déchets et à la récupération des matériaux dans l'ensemble de ses activités mondiales.

Aux États-Unis, la Solid Waste Authority of Central Ohio et ses partenaires ont mis sur pied une campagne de sensibilisation intitulée "Save more than food", qui vise à contribuer à l'objectif des autorités locales de réduire de moitié les déchets alimentaires dans la région d'ici 2030. Comment ? En encourageant le grand public à éviter de gaspiller les déchets alimentaires, à en faire don si possible, puis à recycler ces derniers sous forme d'aliments pour animaux, de compost ou à des fins industrielles, plutôt que de les envoyer à la décharge.

Dans le cadre de son programme "zéro déchet", la municipalité de Pune (PMC) en Inde a mis au point des solutions avec l’entreprise de ramassage de déchets de SWaCH pour traiter les déchets humides ; avec comme résultat la diminution des émissions de méthane produits par les déchets organiques jetés dans les décharges ; ce projet couvre également la collecte sélective des déchets électroniques de valeur qui sont redirigés vers la chaîne de recyclage.

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La gestion de l'énergie, des déchets et de l'eau doit être considérée comme une composante essentielle des efforts déployés par les villes pour parvenir à une consommation énergétique nette zéro. Une gestion optimisée, notamment grâce au traitement des données, sera cruciale pour (i) aider à équilibrer les systèmes en pilotant l'offre et la demande, et (ii) assurer la continuité des activités essentielles, telles que les transports et la santé. La réalisation de l'objectif "zéro émission" dépend également de la collaboration des entreprises de services publics, telles que les compagnies de distribution d’eau qui exigent plus d'électricité décarbonée.

Ensemble accélérons la décarbonisation !

Co-auteurs

Cet article a été rédigé en collaboration avec :

  • Lyndie Dragomir, Directeur principal, responsable du marketing et des communications du secteyr mondial, KPMG International
  • Lisa Kelvey, Associé, Conseil en grands projets, KPMG au Royaume-Uni
  • Anvesha Thakker, Co-responsable de la transition énergétique, Global Climate Change & Decarbonization Center, et Partner & Industry Lead Clean Energy, KPMG en Inde
  • Jorn VerbeeckProgramme Net Zero Urban & Decarbonization Innovation Exchange Lead, Global Decarbonization Center, KPMG en Belgique 
  • Karin Egger, Associé, ESG, KPMG au Chilli


  • Valérie Besson - Associée, Responsable des activités KPMG dans le secteur des Énergies et des Ressources Naturelles pour la région Europe, Moyen-Orient et Afrique

    Valérie Besson

    Associée, Responsable des activités KPMG dans le secteur des Énergies et des Ressources Naturelles pour la région Europe, Moyen-Orient et Afrique

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